Brabant wallon

PORTRAIT – Paul et Céline Lefebvre : BRASSERIE LEFEBVRE, un brassin de tradition et d’innovation

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« Il faut apprendre à sentir le parfum des roses » s’exhorte Paul Lefebvre. « C’est vrai dans tous les métiers, mais plus encore dans ceux de bouche où l’exigence par rapport à un produit devient obsessionnelle » ! A 39 ans, celui qui, avec sa sœur Céline, 36 ans, perpétue la société familiale commence seulement aujourd’hui par savourer le goût des victoires, avant de s’appesantir sur ce qui reste en chantier.

Mais la sixième génération qui souffle dans les voiles de la Brasserie Lefebvre est, comme les précédentes, tout aussi passionnée que perfectionniste !

Et ambitieuse autant que réaliste, intégrant l’innovation sans perdre de vue la rentabilité. « D’une certaine façon, c’est rassurant d’arriver dans la société de papa », reconnaît Paul. Mais l’ingénieur industriel (spécialisation brasserie !) a dû convaincre les travailleurs que le gamin qui déambulait en skate dans la cour de la brasserie avait grandi et que sa sœur et lui-même avaient toute leur place dans l’entreprise. Si Céline apporte sa rigueur administrative, suivant avec efficacité et réactivité la préparation des commandes, le reporting, la facturation, les compétences de Paul s’expriment particulièrement dans les aspects techniques, les relations clients et fournisseurs. Choc des générations : entre celle qui monte, qui intègre la digitalisation et l’ancienne, forte de son expérience. Un même objectif, pourtant : pérenniser une tradition et l’image d’une entreprise familiale, proche des besoins de ses clients. « Cela se traduit par exemple dans notre offre de plus petits contenants afin de faire découvrir la diversité de la gamme – des casiers de 12 bouteilles – mais aussi par l’accroissement de notre présence digitale. Nous adorons faire passer des messages aux consommateurs, à travers nos produits, sur le type de breuvage, sa provenance, sa fabrication,… »

COUP DE FORCE

Trois grands « tournants » ont fait de Brasserie Lefebvre la florissante société familiale qu’elle est aujourd’hui.

Remontons aux origines de cette belle histoire… Il était une fois, Jules Lefebvre, un fermier, au sens du business affûté. L’homme a l’idée de développer, à Quenast, sa brasserie-malterie. Nous sommes en 1876. La bière coule à flots partout. Jules doit donc mettre au point un business plan imparable. Il tire profit de la stratégique situation de sa brasserie proche des carrières de porphyre. Ces dernières mobilisent dans la région quantité d’ouvriers de la pierre avides de savourer une bonne bière fraiche du coin lorsqu’ils terminent le travail. En se concentrant sur l’approvisionnement des cafés des environs, le fermier joue un coup gagnant !

Le deuxième tournant décisif est l’œuvre de la troisième génération, menée par Gaston. A la mort de son père Auguste, fils de Jules, Gaston modernise la brasserie, désormais installée à la rue du Croly; il investit dans une bouteillerie et achète de nouvelles cuves de fermentation. Attentif aux avancées technologiques, le jeune homme procure une longueur d’avance à son entreprise ! Le troisième coup de force se résume en un mot : l’exportation, menée tambours battants par la 4è et la 5è génération, Pierre et Philippe Lefebvre.

L’intervention d’une autre famille de brasseurs, les Dubuisson, va donner le coup d’envoi d’un processus de reconversion. « René Dubuisson s’est mis en contact avec mon grand-père pour l’informer de l’intérêt d’un client italien pour les bières de l’Abbaye de Bonne Espérance, relate Paul. Notre premier marché à l’export fut donc l’Italie, avec ces bières qui représentèrent à une époque, la moitié du volume de la production (ndlr : depuis lors, la Brasserie Lefebvre ne les fabrique plus…). Mon père, armé de son diplôme en marketing et de bonnes connaissances en langues, secondé par ma mère, pour la comptabilité, a évidemment largement contribué aussi à l’expansion de la brasserie hors de nos frontières ». Aujourd’hui, les 4/5 de la production quenastoise partent vers une cinquantaine de pays, en priorité la France (25%), où l’on retrouve, en trio de tête, la Barbãr, la Blanche de Bruxelles et la Floreffe, mais aussi la Russie (20%). Et la Brasserie Lefebvre continue de désaltérer également les gosiers de nos compatriotes (ndlr – la Belgique absorbe 1/5è du volume de production).

COUP DE COEUR

PL : « Si ma préférence personnelle va au goût de notre Hopus, développée en cachette pour mon mariage, notre coup de cœur, à Céline et à moi, c’est la Barbãr ! C’est le produit qui a la force de communication la plus importante, que nous n’avions pas soupçonnée au départ ; la Barbãr est née en 1995, du travail conjoint de mon père et de son assistant brasseur qui mirent au point une recette à base de Blanche forte au miel. Or, le coup de génie, est de ne pas en avoir fait une bière sucrée car le miel, ayant subi une fermentation alcoolique, apporte sa touche sans conférer de lourdeur. Cette bière surprise a marqué la génération de mon père et continue de marquer la nôtre. Elle a connu une deuxième jeunesse, depuis que sa bouteille a été dotée du bouchon mécanique. Nous aimons associer la consommation de nos bières à un rituel. Le design de la bière et du verre en font partie – particulièrement réussi en ce qui concerne la Barbar ! – et ce bouchon aussi, que l’on fait sauter en appuyant sur les 2 côtés de la bride. La façon de présenter, de servir le breuvage, de le déguster… c’est presque une célébration !

COUP DE GUEULE

PL et CL : «  Notre n’estimons pas le système scolaire adapté, en termes de connaissance et de valeurs, aux réalités du terrain professionnel. Il faut plonger les jeunes dans le bain plus intensivement. Fevia Wallonie ne cesse de réclamer un rapprochement renforcé écoles-entreprises pour aboutir à des stages plus efficaces et formatifs. Que voulez-vous obtenir, par exemple, avec un stage d’observation de 2 semaines ? Cela a peu d’intérêt, autant pour le jeune que pour l’entreprise ! Lorsqu’une grande entreprise de Wallonie picarde avoue qu’elle n’accueille plus que des stagiaires français, je le déplore, mais comment l’en blâmer ? Et elle n’est certainement pas la seule à le faire ! »

DU TAC AU TAC

CCI mag’ : « Quelle est votre qualité préférée »?

CL : « La bienveillance » !

  1. L : « L’accountability ! Je ne trouve pas de traduction française qui véhicule autant, dans ses nuances, cette idée de confiance, responsabilité. Je l’exprime en une périphrase alors : « je fais ce que je dis, je dis ce que je fais ! »

CCI mag : « Et le défaut que vous ne supportez pas » ?

CL et PL : « La mauvaise foi » !

CCI mag : Et votre principale qualité ?

CL : « Le sens de l’organisation ».

PL : « L’enthousiasme ».

CCI mag’ : Votre principal défaut ?

CL : « Le manque de confiance en moi, mais c’est un défaut sur lequel je travaille (sourire) » !

PL : « L’impatience : je m’agace un peu trop vite… J’avoue être un peu colérique parfois, quand je suis émotionnellement trop impliqué ».

CCI mag : « Le pays où vous aimeriez vivre » ?

CL : « L’Espagne, mais pas l’Espagne touristique ».

PL : « En Belgique, – particulièrement en Wallonie – j’apprécie l’ouverture d’esprit. Si je pouvais le retrouver en Norvège, j’aimerais y vivre car là-bas, la beauté de la nature et le rythme de vie dicté par les lois de cette dernière sont stupéfiants ! »

CCI mag’ : Ce que j’aurais voulu être » ?

CL : « Styliste ».

PL : « Astronaute » !

CCI mag’ : « Votre devise » ?

PL : « Je vous renvoie à ma réponse concernant ma qualité préférée ! »

CL : « Ce n’est pas parce que le changement est programmé que l’on doit négliger de prendre des décisions aujourd’hui, de « soigner son quotidien » !

 

> Céline :

– Humanités : option Latin-Langues

– Licence en gestion à Louvain-La-Neuve

– Mariée et maman d’Achille et Victor

– Apprécie : le sport (tennis, course à pied), les mouvements de jeunesse, la couture…

> Paul :

– Humanités, option Math-Sciences

– Ingénieur industriel section brasserie

– Marié et papa de Sacha et Elias

– Sportif, il apprécie la moto…

 

COPYRIGHT PHOTOS : EH-REPORTERS

BRASSERIE LEFEBVRE – Chemin du Croly, 54 à 1430 REBECQ – Tél : 067/67.07.66 – www.brasserielefebvre.be

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À propos de l’auteur
Rédactrice en chef (Brabant wallon - Hainaut - Wallonie picarde)
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