- Des gammes de vêtements à destination du secteur des soins de santé, de l’entretien, de l’Horeca, de l’industrie
- Les périodes de crise : une opportunité de rencontrer un réseau selon l’administratrice délégué
- La relance, en urgence de la production de masques lavables…
Cette année, Dutra, dont les clients principaux sont les hôpitaux, les maisons de soin et les blanchisseries industrielles mettant en location ses produits , fête ses 65 années. L’occasion pour Mireille Rousseaux, fille de la fondatrice, Agnès Dutranoit, de se replonger dans l’histoire d’une société qui s’est orientée, au fil du temps, vers le vêtement professionnel et s’est spécialisée dans le domaine médical ,au long des dernières décennies.
La crise de la Covid-19 a d’ailleurs ravivé certaines expériences du passé, puisqu’elle a fait resurgir au sein de la PME de Wavre, une activité qu’elle avait été contrainte de délaisser avec l’arrivée du « tout au jetable ». Dutra a ainsi renoué avec la production de masques sanitaires en tissu lavables interrompue depuis 3 décennies !
Au début du mois de mars, pour son personnel puis à l’appel de la clinique Saint-Jean, l’administratrice déléguée a exhumé d’anciens patrons de couture afin de relancer en urgence leur fabrication dans des qualités de tissus conformes dont le polyester. La machine s’est emballée et, très vite, Mireille Rousseaux a décidé avec son équipe de concentrer toutes les forces vives dans cette activité de masques pour venir en aide à ses clients habituels ainsi qu’à d’autres institutions médicales, quitte à postposer certaines autres commandes pour cas de force majeure !
Mariée à un historien, celle qui dit former avec son époux un « couple complémentaire », en partage l’esprit critique et la propension d’analyse. Cette faculté permet de replacer les choses dans leur contexte pour soupeser leur vraie portée et la marge de progression réaliste à viser.
Bien loin de renier le passé, comme en atteste la photo de famille des fondateurs affichée à l’entrée du bâtiment, Mireille Rousseaux se penche avec une acuité exacerbée par la crise sanitaire sur les notions de durabilité, écologie, relocalisation et intelligence collective…
COUP DE FORCE
« Notre coup de force, c’est la communication et la transversalité entre les différents partenaires aussi bien en interne entre les différents process qu’avec les acteurs du secteur et les fournisseurs. Nous sommes réactifs et à l’écoute du marché, nous adaptons et personnalisons nos gammes en fonction des attentes de nos clients.
Un autre coup de force est certainement aussi notre esprit critique par rapport au concept de la durabilité. Nous nous posons la question du comment, nous investiguons les manières de développer l’activité de DUTRA par rapport à l’environnement et la question de l’épuisement des ressources. La durabilité passe-t-elle uniquement par des produits recyclés ? La durabilité, pour nous, correspond d’abord à des vêtements qui résistent au lavage intensif industriel. Ce qui persiste dans le temps est un produit dont la durée de vie est importante. L’usager doit pouvoir le porter longuement et y trouver le confort attendu, le vêtement en sera plus d’autant plus écologique. Par ailleurs, les ressources réutilisées pourront être réintroduites dans les matières des vêtements. L’économie circulaire est au coeur de nos préoccupations et il faut absolument éviter le green-washing. En effet, on constate que le polyester recyclé est parfois issu de bouteilles PET qui ont été produites pour ne jamais voir une seule goutte d’eau. Voilà une belle illustration des dérives de notre société autour de l’écologie !
Nos vêtements sont conçus pour supporter des lavages très répétés à haute température… durant 4 ans. Du reste, la qualité de confort est aussi primordiale puisqu’elle est également un gage de durabilité. Nous veillons aussi à soigner cet aspect.
Aujourd’hui, notre esprit critique nous incite également à des repositionnements sur des produits phares, auxquels on ajouterait un effort technologique, plutôt que de multiplier les références. Améliorons les process, les machines pour pouvoir apporter en quantité, et en relocalisant un maximum, les vêtements et équipements indispensables, quitte à réduire les marges et à abandonner, pour l’instant, des ambitions de produits de niche ».
COUP DE GUEULE
« Je suis encore en rage et mon coup de colère ne passe pas ! Notre secteur industriel de la confection, il faut pouvoir le valoriser, reconnaître le savoir-faire belge. Avec l’un des rebondissements de « l’affaire des masques » achetés à une société obscure luxembourgeoise par le service de la Défense, nous avons eu une triste illustration de la façon dont l’argent public peut être jeté par les fenêtres. Nous étions, dans nos entreprises belges, tout à fait en mesure de produire des masques lavables de qualité répondant aux normes en vigueur mais le temps imparti imposé était trop juste et on ne nous a pas retenus…Avrox, la société luxembourgeoise, a quand même livré en retard, une qualité qui n’est pas à la hauteur des prescriptions d’hygiène. Il ne faut pas oublier qu’on est dans un contexte de pandémie. La Défense s’est fait flouer et sur les délais et sur la qualité.
Le cloisonnement du monde industriel et politique est très dommageable. Ce manque de clairvoyance, d’intelligence collective, cette absence d’approche transversale, cette méconnaissance de ce que fait l’autre font prendre de mauvaises décisions. Créons donc du lien et, partant de là, de la valeur ajoutée !
Repensons plus « local », dans la mesure du possible. Chez Dutra, si nous avons une excellente collaboration depuis plus de 25 ans avec la Tunisie, nous avons réussi à maintenir une partie de l’activité dans notre pays où nous employons 24 personnes avec les petites séries, les tailles spéciales, etc.
Je terminerai en exprimant encore ma colère sur la spéculation en période de pandémie ; c’est un véritable scandale de se remplir les poches de manière éhontée avec des produits de première nécessité dont les stocks s’épuisent ! »
COUP DE COEUR
« La force d’un réseau, les bonnes volontés, toutes ces personnes qui ont bravé leurs appréhensions en respectant les mesures d’hygiène pour collaborer durant le confinement en période de pandémie, c’est là mon coup de cœur. Chez nous, les membres du personnel se sont sentis investis d’une mission qu’ils ont accomplie avec professionnalisme. Cette crise a aussi été une opportunité de revaloriser certains métiers tels que la confection, trop longtemps oubliée durant des décennies : on a vu resurgir des personnes très compétentes dans ce métier”.
DU TAC AU TAC
CCI mag’ : « La qualité que vous préférez, chez un homme » ?
MR : « La patience ! »
CCI mag’ : « Votre principal défaut » ?
M.R : « L’impatience, justement ! (rires) ! »
CCI mag’ : « Votre rêve de bonheur » ?
M.R : « Que les gens puissent trouver l’équilibre dans les choses, faire leurs choix en pleine maturité. Des choix industriels en y mettant l’humain au milieu, pour valoriser chacun, un vrai bonheur ! »
CCI mag’ : « Ce que vous auriez voulu être » ?
M.R : « Un métier dans le domaine de l’Histoire de l’Art que j’affectionne, pourquoi pas ? Avec mon mari historien, nous partageons durant nos vacances ce domaine d’intérêt commun. »
CCI mag : « Votre rêve de bonheur » ?
M.R : « J’adore me reconnecter à la nature, me promener, tous sens en éveil, à l’heure bleue quand les oiseaux se remettent à chanter avant le crépuscule… »
CCI mag’ : « Le pays où vous désireriez vivre » ?
M.R : « On est bien en Belgique ! C’est un beau pays et j’aime les liens qu’on peut y tisser ».
CCI mag’ : « Vos héros dans la vie réelle » ?
M.R : « Les héros du quotidien, justement. Mon personnel, d’autres personnes qui me surprennent… Ces gens qui, dans des moments de crise, ont fait preuve de résilience, ont sorti des prototypes de visières en urgence,par exemple Tous ceux qui ont quitté leur zone de confort, qui ont créé ou recréé des choses, ont fait preuve d’ « agilité ». Ce sont eux, mes héros ».
CCI mag’ : « Le don de la nature que vous aimeriez avoir » ?
M.R : « Mon intuition m’a souvent donné raison dans mes choix… J’aimerais en avoir encore davantage ! »
CCI mag : « Votre devise » ?
M.R : « Connais-toi toi-même. Connais tes forces et tes faiblesses pour aller de l’avant en confiance… »
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