Les employeurs belges sont sceptiques quant à la nouvelle mesure visant à supprimer les certificats médicaux pour un jour d’absence en raison de maladie. En effet, près de 6 entreprises de plus de 50 travailleurs sur 10 (55,8%), concernées par la mesure, sont résolument contre. Trois employeurs sur 4 (76%) pensent d’ailleurs que cette suppression entraînera davantage d’absences de courte durée. Telle est la conclusion d’une vaste enquête menée auprès des 1105 employeurs belges par le secrétariat social de Securex. En outre, il semble que l’introduction de la nouvelle mesure entraînera un changement radical car, actuellement, plus de 8 entreprises concernées sur 10 (83,5%) demandent toujours un certificat médical pour un jour d’absence au travail.
Début juin, les ministres fédéraux compétents, Frank Vandenbroucke et Pierre-Yves Dermagne, ont annoncé une nouvelle mesure : les travailleurs d’entreprises de plus de 50 personnes pourraient s’absenter durant un jour, à raison de trois fois par an maximum, sans devoir présenter un certificat médical.
La récente enquête menée par Securex auprès des employeurs montre donc que cette mesure est accueillie de façon mitigée, voire négative. Seul un cinquième (19,7%) d’entre elles est prêt à accepter cette mesure et un quart (24,5%) affirme qu’il pourrait éventuellement l’autoriser. Parmi les grandes entreprises comptant au moins 25% d’ouvriers, cette acceptation descend même à 8,8%.
Une crainte élevée des potentiels abus
La grande majorité des employeurs s’attend à ce que cette mesure fasse l’objet d’abus. Par exemple, 3 employeurs sur 4 (76%), quel que soit le nombre de travailleurs, pensent que la suppression du certificat médical pour les absences d’une journée entraînera une augmentation des absences d’un jour. Seul 1 employeur sur 10 (11,6%) pense que la mesure n’entraînera pas d’augmentation des absences d’un jour.
« Securex a précédemment démontré que les abus en cas d’absence pour cause de maladie étaient généralement peu nombreux » souligne Elisabeth Etter, consultante en absentéisme chez Securex. « Le risque d’abus est d’ailleurs plus faible dans les environnements où l’accent est mis sur la confiance et non sur le contrôle. Une différence importante réside dans la solidarité et l’engagement que les travailleurs ressentent envers leur employeur et leur travail. Il est possible qu’il y ait plus d’absences d’un jour, mais également moins d’absences de plusieurs jours car, sans certificat médical, davantage de personnes retourneront au travail après seulement un jour. »
Les réactions des entreprises interrogées montrent que nombre d’entre elles s’attendent à ce que les travailleurs utilisent un “jour de congé maladie sans certificat”, pour lequel aucune justification n’est requise, en particulier les lundis et les jours de pont.
« L’étude démontre qu’il n’y a pas plus d’abus les lundis et les vendredis, ni les jours de pont » précise Elisabeth Etter. « Les employeurs doivent traiter les absences au travail de façon cohérente et constructive, sur la base d’accords clairs dans lesquels le dialogue est important. Par exemple, que l’absence soit signalée via un appel téléphonique au manager, et non par un SMS ou un email. Il est bon d’avoir un contact personnel dès le début de l’absence. »
Une adaptation radicale est nécessaire
Aujourd’hui, plus de 8 entreprises de plus de 50 travailleurs sur 10 (83,5%) continuent de demander à leur personnel de présenter un certificat médical lorsqu’un travailleur s’absente une journée pour cause de maladie. Moins d’une entreprise concernée sur dix (8,7%) ne le demande jamais. Cette obligation est moins courante (69,2%) dans la région de Bruxelles, où les grandes entreprises ont tendance à collaborer avec davantage d’employés. Les grandes entreprises employant plus d’un quart d’ouvriers exigent systématiquement un certificat médical pour un jour d’absence en raison de maladie (90,7%).
Cette nouvelle mesure nécessitera donc un changement majeur dans les grandes entreprises en Belgique.
Selon Elisabeth Etter, cela peut inciter à se concentrer encore davantage sur la motivation des travailleurs : « Cette mesure est en contradiction avec une politique RH basée sur le contrôle, qui augmente effectivement le risque d’abus. La suppression du certificat médical d’un jour est l’occasion de donner aux travailleurs un signal constructif de confiance, de solidarité et de responsabilité qui débouche sur une situation gagnant-gagnant. »
Aucun soutien non plus de la part des petites entreprises
Le gouvernement fédéral a également déjà annoncé que la mesure serait évaluée un an après son introduction et éventuellement étendue aux petites entreprises de 20 travailleurs ou plus. Selon l’enquête de Securex auprès des employeurs, 8 entreprises sur 10 (79,6 %), comptant entre 20 et 50 travailleurs, ont déjà indiqué qu’elles n’étaient pas prêtes à introduire la mesure en question. Seules 9,5% d’entre elles sont disposées à le faire. Tout comme les entreprises de plus de 50 travailleurs, 8 entreprises de 20 à 50 travailleurs sur 10 (82,8%) continuent de demander un certificat médical en cas d’absence d’un jour.
(photo Pixabay)