Il faut voir le terminal ferroviaire implanté à Bierset à quelques encablures de l’aéroport ! De part et d’autre d’un vaste quai, deux longs convois de 650 mètres chargés de containers de toutes les couleurs : l’un assure la liaison avec le nord de l’Italie, l’autre avec la Chine. Entre les trains, sur le quai, un engin impressionnant assure la manutention des containers. Malgré la guerre en Ukraine, le trafic se poursuit entre l’est de la Chine et Liège, mais vaille que vaille. Il s’est réduit de plus de 50 % !
Encombrement en Pologne
« Au début de cette année » explique Vincent Brassinne, l’administrateur-délégué de Liège Logistics Intermodal (LLI), « il y avait chaque semaine 6 à 7 convois dans les deux sens; actuellement il n’y en a plus que trois. Cela s’explique pour plusieurs raisons. Le coût des assurances qui couvrent le voyage a fortement augmenté depuis le début de la guerre et certains fournisseurs ou destinataires hésitent à prendre le risque de voir leur marchandise confisquée sur le territoire russe. D’autre part, l’itinéraire qui passait par l’Ukraine et la Hongrie a du être abandonné, ce qui provoque un engorgement et des retards sur l’itinéraire nord, à la frontière entre la Biélorussie et le Pologne. Enfin, il y a de nouveau un confinement à cause du coronavirus dans la région de Zenghzhou et l’activité économique y est fortement réduite. »
Les trains en provenance de Chine importent des produits très variés, dont 20 % sont destinés à la plateforme liégeoise de Cainiao, la filiale d’Ali Baba, et repartent la plupart du temps avec des matériaux lourds, de l’acier notamment, des machines, parfois même des voitures, et des équipements industriels.
La manutention sur place est assurée par une dizaine de personnes auxquelles s’ajoutent quatre employés administratifs. « Cela peut sembler peu mais c’est tout un écosystème qui s’est créé à Liège grâce à l’intermodalité avion, train, bateau » précise Vincent Brassinne.
Bref, voilà donc un outil qu’il convient de préserver. Heureusement, il y a ces neuf trains hebdomadaires qui assurent une liaison régulière avec le nord de l’Italie, notamment vers Milan et Piacenza.
A l’aller, les trains transportent surtout de l’acier, du bois, des lingots de zinc, des chaussures, etc. Au retour, ils sont principalement chargés de produits alimentaires. « Le trajet se fait par l’Allemagne et la Suisse et dure 36 heures. Les logisticiens préfèrent éviter la SNCF… »
Nouvelles routes de la soie
Pour maintenir et développer à Liège cet écosystème intermodal, il faut obligatoirement trouver de nouveaux débouchés. Heureusement, des projets de création de nouvelles liaisons au départ de Liège existent vers l’Espagne, les Balkans et la Turquie.
Ces deux dernières destinations pourraient devenir essentielles si la guerre devait se poursuivre en Ukraine. En raison de la situation internationale, de nouvelles « routes de la soie » se sont ouvertes depuis la Chine, par le Kazakhstan, la traversée de la mer Caspienne, l’Azerbaïdjan, la Géorgie, la Mer Noire et le port roumain de Constanta.
Deux transbordements ferroviaires, cela fait perdre du temps mais la durée du trajet d’une vingtaine de jours reste très inférieure à celle du transport maritime traditionnel par le Canal de Suez qui prend entre un mois et demi et deux mois. En outre, l’infrastructure ferroviaire devrait être modernisée en Turquie – toujours bien placée ! -, ce qui pourrait réduire le nombre de passages par la Mer Noire.
Quant au terminal du Trilogiport, le prochain objectif sera le doublement de la longueur du rail exploitable pour éviter la division des trains en deux tronçons. Il sera dévolu au transport vers les ports maritimes, principalement Zeebrugge et Dunkerque. Bref, chez LLI, en dépit ou grâce aux circonstances actuelles, on se remue pour promouvoir un mode de transport qui produit cinq fois moins d’émissions de CO² que les camions. Sans compter la diminution des nuisances, en particulier le désencombrement des autoroutes…