Pour la onzième fois déjà, KPMG Eurométropole organisait le 27 novembre dernier, les Ateliers franco-belges.
L’événement destiné à promouvoir l’entrepreneuriat transfrontalier au sein de l’Eurométropole Lille-Kortrijk-Tournai s’était installé cette fois dans les locaux de la Chambre de commerce CCI Wallonie-Picarde à Tournai. A nouveau, les ateliers pouvaient compter sur une grande affluence.
L’Eurométropole est une région à fort potentiel de croissance particulier mais aussi avec des points d’attention spécifiques pour ceux qui veulent développer des activités transfrontalières.
KPMG Eurométropole dispose d’une équipe d’experts étendue et d’une méthodologie unique pour conseiller les entrepreneurs en la matière. Pas étonnant, dès lors, de recenser une centaine d’entrepreneurs du Hainaut, du Nord de la France et de la Flandre Occidentale aux Ateliers dont le thème central était l’acquisition et la gestion d’une propriété de l’autre côté de la frontière.
Témoignage de 3 entreprises familiales
La pièce maitresse de cet évènement était aussi, cette année, la table ronde des entrepreneurs de la région : Philippe Foucart (Technord), Sigrid Pauwelyn (Trotec) et Pierre Vandeputte (Vandeputte), trois entrepreneurs familiaux, étaienti venus témoigner de leurs expériences avec une filiale en France.
Le point de départ de leur réflexion était l’évaluation des différences entre faire des affaires en France et en Belgique, mais aussi de rechercher le meilleur des deux mondes.
Pierre Vandeputte en tant que PDG représente la quatrième génération du groupe Vandeputte, une entreprise familiale de Mouscron, fondée il y a 130 ans, qui produit du savon, des détergents, des huiles et des dérivés oléochimiques. « Nous fournissons depuis très longtemps des détaillants françaises. Ils nous ont vite fait comprendre qu’il nous fallait au moins une adresse de facturation en France. Cela a finalement conduit à la création d’un bureau de liaison à Roncq. En 2017, l’opportunité s’est présentée de reprendre un site de production à Boulogne-sur-Mer. Pour nous, c’était vraiment un « must » car nos clients recherchaient de plus en plus un produit « Made in France ».
Technord est un intégrateur de l’ingénierie électrique, l’automatisation et l’informatique industrielle. L’entreprise familiale dans sa deuxième génération, emploie 400 personnes et possède des bureaux en Belgique, en France (Lille ; Orléans et Lyon) et en Suisse. « Depuis Tournai, nous avons rapidement développé des activités dans le Nord de la France et avons également constaté qu’une structure juridique était nécessaire pour y faire des affaires. En tant qu’intégrateur de systèmes et de prestataire de services, nous devons être proches de nos clients. Nous nous sommes donc établis à Lyon et, plus récemment, à Orléans » déclare Philippe Foucart.
Sigrid Pauwelyn représente comme PDG la deuxième génération de Trotec qui transforme les sous-produits de l’industrie alimentaire en matières premières pour l’alimentation animale. “Nous collectons nos matières premières dans un rayon de 300 km autour de l’entreprise. Nos clients nous demandaient régulièrement une solution pour les sous-produits de leurs sites dans le sud de la France. C’est la raison pour laquelle nous avons investi dans un deuxième site à Albon, près de Lyon”.
France : une pluralité de cultures
En France, il y a une approche différente des affaires. « Chez nous, nous avons l’habitude d’aller droit au but lors d’une réunion, alors qu’en France on préfère prendre le temps pour envisager et discuter des affaires. Un tour de table, au début de la réunion, prend donc beaucoup plus de temps qu’en Belgique. Chose à laquelle il vaut mieux s’adapter », déclare Pierre Vandeputte.
Philippe Foucart en convient. « Plus vous descendez dans le Sud, plus vous vous écartez du pragmatisme belge. Et n’oubliez pas que chaque région a sa propre culture. Entre Lyon et Orléans, il y a un monde de différences. J’ai également remarqué que les Français attachent plus d’importance à une structure hiérarchique. Dans vos négociations avec les gros clients, vous avez intérêt à y consacrer le temps nécessaire et à respecter la hiérarchie en place”.
Trotec compte une vingtaine d’employés à Albon. Sigrid Pauwelyn a remarqué qu’en raison de la culture française, elle avait assez rapidement dû adapter son approche en matière de personnel: “À Furnes, nous avons une structure relativement horizontale avec beaucoup de participation et de droit de regard de la part des employés. J’ai essayé de faire la même chose en France, mais cela ne fonctionne tout simplement pas. Ils discutaient tout le temps, beaucoup de temps était perdu et les choses ne se passaient pas. Il s’est avéré qu’ils préfèrent fonctionner avec un « chef » qui porte la responsabilité”.
Un grand marché à proximité
Les trois entrepreneurs sont des ardents défenseurs des entreprises transfrontalières. Philippe Foucart: “C’est un marché 17 fois plus grand que la Belgique et qui offre donc 17 fois plus d’opportunités commerciales. Les autorités publiques et les services de l’emploi apportent un soutien important et adapté. Faire des affaires avec nos voisins est donc fortement recommandé. En premier lieu, nous allons maintenant consolider nos activités, mais je vois des opportunités de développement dans l’ouest et le sud-ouest de la France. “
Trotec aspire également à une expansion supplémentaire. “Notre objectif est de poursuivre notre expansion même à l’international”, a déclaré Sigrid Pauwelyn. “Nous avons développé un concept pour la France et nous remarquons que cette approche fonctionne. La prochaine étape, d’ici quelques années, est donc de voir où nous pouvons ouvrir de nouveaux sites, en France et à l’étranger. Grâce à notre activité, nous contribuons également à la réalisation des objectifs européens de boucler davantage la chaine alimentaire et d’éviter au maximum le gaspillage alimentaire”.
“Dans notre cas, la filiale française nous permettait d’assurer à l’avenir, un tiers de notre chiffre d’affaires”, souligne Pierre Vandeputte. “Le défi consiste maintenant à faire en sorte que les employés belges ne voient pas la société française comme un concurrent, alors que ce n’est pas le cas. Ce sont en effet des sociétés complémentaires et nous souhaitons échanger les meilleures pratiques entre elles afin que les deux sites puissent continuer à se développer”.