Nous deviendrons tous des travailleurs gig dans une économie gig, selon les dires des prévisionnistes les plus enthousiastes.
Le terme vient de l’industrie de la musique.
Comme un artiste qui est embauché uniquement pour un spectacle (gig), un travailleur gig est actif auprès d’un donneur d’ordre pour un projet limité dans le temps. La relation traditionnelle de travail entre un travailleur et un employeur, surtout celle à durée indéterminée, devrait connaître à terme moins de succès.
Cela n’est pas encore le cas pour l’instant. Les travailleurs gig sont en effet encore à l’heure actuelle en minorité sur le marché du travail , que ce soit aux Etats-Unis, en France ou en Belgique. Cette situation devrait encore durer un petit moment. Un contrat de travail classique, à temps plein ou partiel, offre en effet beaucoup d’avantages. La sécurité, pour n’en cite qu’un. Tant pour le travailleur que pour l’employeur.
Mais le marché du travail est aussi en pleine mutation. Le besoin de flexibilité et d’agilité, la digitalisation grandissante, l’internationalisation et les pénuries de main-d’œuvre font prendre conscience aux entreprises qu’un nouveau monde plus flexible est à nos portes. Celui où on compte des collaborateurs qui ne se retrouvent pas dans la catégorie des travailleurs fixes. Il s’agit d’un groupe très large et pluri-forme : les intérimaires bien entendu, mais aussi les (sous-)contractants, les consultants, les sous-entrepreneurs, les indépendants et les freelances. Parfois avec un intermédiaire : une firme spécialisée d’outsourcing, une entreprise de payrolling ou même parfois une plateforme digitale.
Les travailleurs sont aussi plus souvent partagés dans le cadre du co-sourcing.
Défis du droit du travail
Une telle flexibilité permet à l’employeur de faire face aux périodes de pointe. Ou d’introduire une expertise spécifique chez lui. La vitesse est aussi un élément important. Et parfois aussi joue l’aspect coût. Même si le coût d’un collaborateur externe n’est pas toujours inférieur à celui d’un travailleur fixe. Tout cela représente en tout cas un défi au niveau juridique.
Notre droit du travail ne connaît que des travailleurs et des indépendants. L’employeur exerce son autorité sur un travailleur, alors que cela n’est pas le cas chez un indépendant. Et exercer son autorité sur des travailleurs d’un autre employeur n’est pas autorisé, sauf dans les conditions strictes du travail intérimaire ou de la mise à disposition licite. Tout cela peut être flou dans la pratique.
Le lien de subordination devient vague pour certains travailleurs. Surtout les travailleurs du savoir déterminent souvent comment, où et quand ils effectuent leurs prestations. Alors que certains indépendants sont parfois astreints à un cadre très strict d’arrangements. Le risque de faux-indépendant ou de faux-salarié nous pend au nez.
Travailler correctement d’un point de vue juridique
Des voix s’élèvent pour créer un statut intermédiaire entre les travailleurs et les indépendants. Ce qu’on appelle le travailleur autonome. Le statut doit offrir suffisamment de protection et de droits minima, mais aussi une plus grande flexibilité, autonomie et employabilité. Le Conseil National du Travail ferme la porte pour l’instant. Il est d’avis qu’un nouveau statut ne doit pas être créé, mais qu’il vaut mieux réfléchir à la manière dont les statuts actuels sont adaptés à l’économie de la plate-forme.
L’ancien Ministre fédéral de l’Emploi Peeters partageait cet avis. Pourtant les responsables RH doivent pouvoir répondre aux défis. La flexibilité, l’autonomie et la maniabilité deviennent une réalité grandissante. Et peut-être que la législation n’y est pas encore suffisamment préparée. Elle offre cependant déjà l’espace pour organiser le travail correctement d’un point de vue juridique. Avec des travailleurs et des indépendants lancés dans une vague flexible.
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