Chaque jour, plus de 6 travailleurs sur 100 sont absents pour maladie. Ce taux connaît une croissance ininterrompue depuis 2001. Et c’est surtout la hausse de l’absentéisme de longue durée qui a atteint en 2013 un niveau sans précédent. Le vieillissement croissant et le stress au travail apparaissent comme les causes principales de cette évolution alarmante. C’est ce qui ressort des résultats de l’étude annuelle sur l’absentéisme dans le secteur privé, réalisée par le prestataire de services RH Securex.
Chaque jour, il y a plus de travailleurs absents pour une longue que pour une courte durée
Le taux d’absentéisme pour maladie total a augmenté de manière significative, en passant de 5,95 % en 2012 à 6,26 % en 2013, et dépasse pour la première fois la barre des 6 % en 13 ans. Alors que les taux de l’absentéisme[1] de courte durée (moins d’un mois) et de durée moyenne (de 1 mois à 1 an) sont restés stables (respectivement 2,12 % et 1,86 %), la hausse de l’absentéisme de longue durée (plus d’un an) est la plus forte jamais enregistrée, puisqu’elle est passée de 2,01 % en 2012 à 2,27 % en 2013. Ces dernières années, ce sont principalement les absences de plus d’un an qui ont connu une croissance exponentielle : + 5 % en 2011, + 10 % en 2012 et + 12 % en 2013. Par conséquent, l’absentéisme de plus d’un an est devenu plus important que l’absentéisme de moins d’un mois.
La durée moyenne des absences a donc augmenté en conséquence. En 2013, une absence pour maladie durait en moyenne 14,05 jours ouvrables, soit une augmentation significative par rapport à 2012 où l’absence moyenne durait 13,16 jours ouvrables.
Le vieillissement et le stress au travail pointés du doigt
Le vieillissement explique la plus grande partie (58 %) de l’augmentation des absences de longue durée depuis 2001. En 2013, les plus de 50 ans représentaient un cinquième de la population active, soit 7 % de plus qu’en 2012 et près du double de 2001. En outre, Securex constate chaque année depuis 2001 que les travailleurs plus âgés sont certes moins souvent absents, mais le sont plus longtemps que les travailleurs plus jeunes. En 2013, les plus de 50 ans comptent 7,6 fois plus de jours d’absence pour maladie de plus d’un an que leurs collègues plus jeunes.
Le stress au travail est également à la base de l’augmentation de la durée des absences. Lorsque les travailleurs ne peuvent plus gérer leur stress, ils s’exposent à des problèmes physiques et psychologiques, qui peuvent porter préjudice aux performances. Des exemples de problèmes liés au stress sont les maux de tête, les palpitations, les insomnies, les troubles de la concentration, les pensées dépressives, les accès de colère rapides, etc. Ces problèmes liés au stress sont responsables de plus d’un tiers (37 %) des jours d’absence pour maladie en 2013 (contre 24 % en 2005). Une étude antérieure avait déjà montré que plus de 1 travailleur sur 4 (27 %) souffre de problèmes liés au stress.[2]
Les groupes à risques exposés aux absences de longue durée pour maladie
Certains groupes de travailleurs présentent plus de risques d’être malades pour une période moyenne ou longue. Ci-dessous, les taux d’absence respectifs par groupe à risques :
- Les travailleurs plus âgés (60-64 ans) : 15,89 % pour l’absentéisme de longue durée et 2,90 % pour l’absentéisme de durée moyenne
- Les travailleurs avec beaucoup d’années d’ancienneté (plus de 20 ans) : 8,15 % pour l’absentéisme de longue durée et 2,31 % pou l’absentéisme de durée moyenne
- Les ouvriers : 3,43% pour l’absentéisme de longue durée et 2,67% pour l’absentéisme de durée moyenne
- Les travailleurs à temps partiel : 2,80% pour l’absentéisme de longue durée et 2,54% pour l’absentéisme de durée moyenne
- Les femmes : 2,69% pour l’absentéisme de longue durée et 2,34% pour l’absentéisme de durée moyenne
- Les grandes entreprises (plus de 1000 travailleurs) : 4,32% pour l’absentéisme de longue durée et 3,04% pour l’absentéisme de durée moyenne
- Les provinces du Hainaut (3,29 % et 2,32 %), de Liège (3,22 % et 2,27 %) et du Limbourg (2,48 % et 1,99 %).
Les secteurs qui sont confrontés à un taux élevé d’absentéisme de longue durée se caractérisent par un nombre élevé de travailleurs appartenant à ces groupes à risques, par des activités présentant généralement une charge physique et mentale importante, et par certaines professions en pénurie telles que les infirmiers, les aides-soignants et les agents de propreté. Dans le secteur de l’aide aux familles et aux personnes âgées, la pénurie de personnel ne fera que s’accroître à l’avenir avec le vieillissement du personnel et de la clientèle. Il est donc d’autant plus important de mener une politique de réintégration bien étudiée.
Top 10 des secteurs d’après le pourcentage d’absentéisme maladie de moyenne et longue durée en 2013
Secteurs |
% maladie > 1 mois – 1 an |
% maladie > 1 an |
Entreprises de travail adapté et ateliers sociaux |
3,84 % |
8,11 % |
Entreprises de nettoyage |
3,96 % |
6,42 % |
Ouvriers dans l’enseignement libre (nettoyage, jardinage, chauffeur,…) |
2,35 % |
7,29 % |
Industrie du textile et de la bonneterie |
2,64 % |
6,58 % |
Entreprises de récupération (métaux, loques, papiers) |
2,49 % |
6,43 % |
Entreprises d’entretien du textile (nettoyage à sec, repassage,…) |
4,08 % |
4,53 % |
Aides familiales et aides seniors |
4,16 % |
4,21 % |
Habillement et confection |
1,97 % |
5,81 % |
Industrie céramique |
2,65 % |
4,66 % |
Industrie chimique |
2,21 % |
4,46 % |
Tous les secteurs |
1,86 % |
2,27 % |
Secteurs de 5 à 260 employeurs et de 200 à 13 000 travailleurs dans notre échantillon
Les employeurs risquent de plus en plus de payer la note
En 2013, les absences pour maladie ont coûté aux employeurs belges 10,6 milliards d’euros, dont 3 milliards destinés aux salaires mensuels garantis des travailleurs malades. Le solde est absorbé par les coûts indirects liés à la réorganisation du travail, aux frais de remplacement temporaire et d’heures supplémentaires, ainsi qu’au traitement et à la rectification entraînée par les problèmes de qualité. Le coût de l’absentéisme pour les employeurs belges reste élevé, avec un minimum d’un million d’euros pour 200 travailleurs.
Heidi Verlinden, HR Research Expert : « Le coût de l’absentéisme de longue durée est essentiellement pris en charge par les mutualités et, par extension, par l’ensemble de la société. Mais ce qui est aujourd’hui un coût important pour la société, risque de l’être demain pour les employeurs. Étant donné la pénurie éventuelle sur le marché du travail dans certains secteurs, le remplacement des absents de longue durée et par conséquent, les frais indirects propres à l’absentéisme de longue durée, risquent de coûter encore plus cher ».
Travail adapté et réintégration : un autre regard sur l’absentéisme
Il est indispensable d’adopter un autre regard sur la gestion de l’absentéisme pour maladie, afin d’une part de réduire la durée des absences ou de les éviter, et d’autre part de préserver les employeurs de frais supplémentaires. Les entreprises doivent non seulement éviter les absences, mais aussi les suivre et favoriser le retour au travail.
Karin Roskams, Manager Absentéisme : « Il est impératif d’assurer un suivi actif pendant les absences de longue durée et de se concentrer sur le travail adapté et la formation lors de la reprise du travail. Plus la durée de l’absence est longue, plus le travailleur risque de ne pas reprendre le travail[3]. Il est donc vivement recommandé de préparer au plus vite son retour. Un suivi à partir de 4 semaines d’absence est conseillé. Il est important que les employeurs et les médecins portent leur attention sur ce que le travailleur ‘peut faire’, plutôt que sur ce qu’il ne ‘peut plus faire’, comme c’est souvent le cas à l’heure actuelle. »
En proposant un travail adapté à chaque travailleur, pas uniquement les plus âgés ou les absents de longue durée, les employeurs peuvent donc éviter de nombreuses absences de longue durée et motiver leur personnel. Les entreprises qui y parviennent sont sur la bonne voie.
[1] L’absentéisme de courte durée représente le nombre de travailleurs sur 100 qui, en moyenne par jour, sont absents depuis moins d’un mois ; l’absentéisme de durée moyenne fait référence au nombre de travailleurs qui, en moyenne par jour, sont absents depuis plus d’un mois mais moins d’une année ; et l’absentéisme de longue durée renvoie aux absences de plus d’un an.
[2] Pourcentage basé sur des chiffres récents recueillis par le biais d’un questionnaire en ligne mené auprès de 2088 salariés en février et en mars 2013. Après rééchantillonnage, l’échantillon comptait 1318 répondants. Cet échantillon est représentatif du marché du travail belge pour les variables que sont le sexe, l’âge, la région et le statut. Voir aussi le communiqué de presse « Trop de stress auprès des travailleurs implique également de gros tracas pour les employeurs » sur http://www.securex.be/fr/detail-page/Communiqu-de-presse-Trop-de-stress-chez-les-travailleurs-implique-galement-de-gros-tracas-pour-lemployeur/
[3] Source : rapport de la Fondation européenne pour l’amélioration des conditions de vie et de travail. Wynne R. & McAnaney D. (2004) Employment and disability: Back to work strategies. Disponible sur http://www.eurofound.europa.eu/publications/htmlfiles/ef04115.htm