Brabant wallon

Marc Ducobu (Maison DUCOBU – Waterloo) : une vocation née dans l’oeuf

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Avril 2025 : de drôles de personnages ont envahi en nombre la Maison Ducobu à Waterloo. Moue boudeuse, mine sceptique ou sourire radieux, ils affichent tous une humeur différente sur leur face de chocolat. Alignés sur les étagères, probablement s’entrainent-il en secret à agiter leur paire d’ailes, une fois la boutique fermée. C’est qu’ils seront prochainement largués dans les jardins des enfants sages par une cloche… Mais une fameuse cloche, car ces craquants chenapans ont des dimensions hors normes !

L’hommage à Horta à travers « Bel’Œuf »

Chaque année, à Pâques, l’atelier Ducobu réalise en effet de grands sujets, en renouvelant leur aspect… Ces créations fièrement exposées accueillent les clients qui franchissent le seuil de la boutique et repartent avec des petits sachets emplis de douceurs ovales colorées. En 2025, à l’occasion de cette fête, la Maison a tout particulièrement mis à l’honneur la cloche ; elle a imaginé, par exemple, un dessert mousse chocolat lait et noir, crémeux tonka, ganache fleur de sel, biscuit et croustillant chocolat surmonté d’une vingtaine de petits œufs mouchetés, dissimulés sous une cloche opaque ! Le nom du gâteau ? La cloche surprise !

Décidément, l’œuf est une source d’inspiration inépuisable pour Marc Ducobu, qui a installé sa boutique en centre ville depuis 22 ans : « Nous sommes partis d’une ruine, nous avons tout démoli, puis tout reconstruit à notre idée. Tout est donc minutieusement étudié, depuis les revêtements de sols et murs des ateliers jusqu’au matériel, monté sur des roulettes pour faciliter le nettoyage ».

Le pâtissier-chocolatier est à l’initiative d’une exposition originale abritée dans l’hôtel Amigo transformé en galerie d’art au moment de Pâques. Organisé pour la 3ème année consécutive, « Bel’ Œuf », le nom de cette expo, présente les œuvres d’artisans chocolatiers invités à revisiter, en toute liberté, l’œuf en chocolat. La seule contrainte est liée à la thématique de chaque édition, cette année l’art déco, mouvement de design emblématique né dans les années 1920.

« L’avantage, en pâtisserie-chocolaterie, c’est que l’on peut s’inspirer de différents métiers : dessinateur, peintre, sculpteur, architecte… »

La Maison Ducobu a donc apposé sur sa création et paraissant s’en échapper, de légères volutes en chocolat vert, évoquant les arabesques de métal de l’art déco. D’autres passionnés de l’univers du chocolat l’ont rejoint, une bonne trentaine au total, comme Pierre Marcolini, Raphaël Giot, Jean-Philippe Darcis, Grains de Vanille, C comme ou Arnaud Champagne.

« Nous serons davantage encore l’an prochain », se réjouit l’instigateur de cette « fièvre » qui semble gagner ses collègues, probablement conquis aussi par l’objectif humanitaire qui se cache derrière l’expo.

Les fonds récoltés par la vente des pièces, vendues 750 euros l’unité et la plupart du temps acquises par des sociétés, sont en effet reversés à la Fondation Saint-Pierre, organisation caritative dédiée au bien-être des enfants. 

Aujourd’hui, à 53 ans, Marc Ducobu a réussi à fédérer autour de cette belle initiative des artisans qui sont tout aussi passionnés que lui par leur métier, mais dont la vocation ne fut peut-être pas aussi précoce que la sienne.

« Vers 8, 9 ans, je savais que je voulais devenir pâtissier. Je n’en ai jamais douté et je ne l’ai jamais regretté, affirme-t-il. Je suis allé au Ceria pour me frotter un peu à tout ce qui tourne autour de l’Horeca durant deux ans : salle, cuisine,… Ensuite, je me suis orienté vers la boulangerie-pâtisserie, puis j’ai suivi une spécialisation en glacerie-chocolaterie. J’ai eu la chance, durant mes stages, de me former dans de belles maisons et d’y rencontrer de talentueux pâtissiers : Wittamer, Debailleul, la pâtisserie Espagne,… J’ai pu me perfectionner en travaillant un peu partout, par exemple en Egypte, en Israël, en Turquie, pour les Hilton. 

Ses diverses expériences ont attisé l’attrait du pâtissier pour les saveurs d’ailleurs, et renforcé son opiniâtre recherche de raffinement et d’excellence ; presque naturellement, Marc Ducobu a rejoint, il y a 15 ans, « Relais Desserts » qui rassemble l’élite mondiale de la haute pâtisserie française pour la faire rayonner partout… Deux Wallons ont l’honneur de faire partie de sa petite centaine de membres : Jean-Philippe Darcis et Marc Ducobu. 

« Il y a très souvent une histoire derrière un gâteau, comme notre « Shangai », au riz-safran, que nous avions imaginé à l’époque de l’expo universelle de Shangai et proposé durant des années en boutique… »

La mission de l’association est, défend celle-ci sur son site internet, « de mutualiser des compétences, mettre à disposition ses valeurs pour servir les intérêts des générations montantes, tout en encourageant vivement l’expression personnelle… »

« Il faut être parrainé pour pouvoir y entrer, souligne l’ambassadeur du chocolat belge. Pour ma part, c’était par Paul Wittamer et Jean-Philippe Darcis ».

Des artisans des 4 coins du monde…

Son parcours, ses voyages, ses concours, l’association « Relais Desserts »,… Ces influences multiples, ce métissage de cultures nourrissent les réalisations du fondateur de la Maison Ducobu.

Ce dernier aime d’ailleurs y favoriser les échanges et partages d’expériences, il y encourage la créativité teintée de touches locales : « Ici, sourit-il, nous accueillons avec bonheur des stagiaires et pâtissiers de tous âges, genres, origines : un Japonais, un Africain, un Italien, un Corse… Un Breton fait aussi partie de l’équipe, qui adore le sarrasin et tentera de l’incorporer prochainement dans un dessert. Je les challenge, et on goûte ensemble le résultat de leurs recherches et expérimentations. Le mélange de points de vue, d’origines, mais aussi de goûts et de parfums : tout cela contribue vraiment à mon épanouissement dans la discipline… »

A la Maison Ducobu, des ateliers distincts, dirigés par des chefs de postes y officiant depuis de longues années, offrent une gamme complète de douceurs : la chocolaterie, la glacerie, la pâtisserie, les viennoiseries…

Le pâtissier-chocolatier, qui se définit comme un « perpétuel apprenti », aiguise sans cesse son sens de l’observation et de la curiosité, avide d’évoluer, encore et toujours…

« Chez nous, rien n’est figé : nous n’avons qu’une seule boutique, donc nous conservons la liberté de faire de la pâtisserie au fil des saisons et des envies, d’être dans la création tout le temps. Quand on a plusieurs boutiques, c’est plus compliqué, « formaté », invariable… », estiment Marc Ducobu et son épouse, Claire.

Des grands classiques revisités et des « éphémères »

Bien entendu, les grands classiques restent indétrônables et les clients aiment retrouver à chaque saison, leurs pâtisseries préférées. « Certaines traditions restent ; on a fait 800 crêpes à la Chandeleur, la galette des rois est un must, les tartes « classiques » sont toujours autant appréciées ; néanmoins, nous faisons aussi des « éphémères », comme notre gâteau de Pâques à la fève tonka et vanille. Et nous n’hésitons pas à revisiter des pâtisseries, en faisant évoluer la recette de base… », explique l’artisan.

Il n’est pas étonnant que ce membre de « Relais Desserts » soigne chaque détail, non seulement de ses gâteaux, mais aussi du packaging ou de la communication, bien entouré par des spécialistes de différents métiers ; il est aussi conseillé par ses filles, Margaux, 25 ans, son ainée, diplômée en communication de l’ULB et Chloé, 23 ans, qui a suivi des études dans l’événementiel. Sa petite dernière, Manon, 15 ans, est encore un peu jeune pour aider son père, mais elle aime déjà faire de la pâtisserie !

Mais Marc Ducobu peut surtout compter sur le soutien de son épouse, qui gère les aspects administratifs et sert aussi les clients en boutique. Ensemble, avec leur équipe d’une vingtaine de personnes, ils perpétuent un métier de tradition et d’innovation. « Ma plus grande satisfaction, c’est d’exercer une profession de gourmandise, de partage et d’émotion. Je n’aime rien tant que susciter le « Waoow » chez ceux qui dégustent nos desserts ! », affirme cet artisan qui avoue n’avoir jamais douté de sa vocation ou regretté son parcours!

DUCOBU –  Rue de la Station 16, 1410 Waterloo – Tél : 02/351.87.87 – www.ducobu.be

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Rédactrice en chef (Brabant wallon - Hainaut - Wallonie picarde)
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