Entreprendre dans le secteur pharmaceutique, peu osent s’y risquer. C’est pourtant le pari qu’a relevé Thouria Louhmadi en créant la société Phacobel, voici une quinzaine d’années. Devenue leader sur le marché belge des probiotiques, elle nourrit encore de nombreuses ambitions pour son entreprise. L’exportation en ligne de mire, cette dynamique dirigeante revient sur son parcours guidé par l’intuition.
« Je suis une fille de l’Atlas », débute Thouria Louhmadi. C’est en effet à Marrakech, loin de son Condroz d’adoption, que cette femme de tête a vu le jour. Elève brillante, elle se hisse adolescente parmi les meilleurs éléments de son lycée. Des résultats qui lui permettent de décrocher une bourse pour poursuivre ses études en Europe. «J’hésitais alors entre la France et la Belgique. Mon choix s’est finalement porté sur Liège car j’y avais trouvé les gens particulièrement chaleureux. La mentalité qui émanait de cette ville était proche de ma culture d’origine.»
Mais à peine installée, Thouria Louhmadi déchante : « L’Université de Liège n’a pu accepter mon inscription en médecine car le quota d’étudiants étrangers était déjà atteint. Pour ne pas rester inactive, je me suis tournée vers la biologie pensant retenter ma chance l’année suivante. Mais entre-temps, je suis tombée enceinte… » Promue dans son nouveau statut de mère, cette amatrice de sciences va finalement poursuivre ses études en biologie tout en enchainant les petits boulots.
L’année 1985 marque la fin de ses études. La recherche la tente mais y décrocher un poste n’est pas chose aisée. « J’avais besoin de travailler. Le premier entretien fut le bon ! J’ai été recrutée comme déléguée médicale et pharmaceutique par le groupe Janssen Pharmaceutica. Une firme, née sous l’impulsion d’un simple pharmacien, dont j’étais admirative.» Un temps sales manager, Thouria Louhmadi évoluera finalement vers le poste d’export manager pour le Maghreb et le Moyen-Orient. « Un job en or que j’ai quitté, au bout de quelques années, pour devenir indépendante.» Dans la famille de notre biologiste, ce changement de statut est accueilli comme une grande nouvelle. «Je suis issue d’un milieu de commerçants. Depuis des décennies, ma famille exporte des produits agro-alimentaires. Au fond de moi, je savais que je créerai un jour ma propre activité.»
Dans un premier temps, Thouria Louhmadi multiplie les missions dans le secteur pharmaceutique tout en poursuivant des recherches à l’ULg. «Je faisais cela par passion, à titre personnel. Mais un jour, j’ai découvert une molécule dotée d’un important potentiel. J’ignorais totalement comment transformer cette découverte en un projet commercial. Je l’ai d’abord proposée à mon ancien employeur mais j’ai été déçue par son accueil. Après moult hésitations, j’ai décidé de me lancer seule dans l’aventure.»
Les résultats scientifiques enregistrés par Thouria Louhmadi portent sur les probiotiques, ces micro-organismes vivants aux effets réputés bénéfiques pour la santé. «Au terme de nombreuses démarches, j’ai obtenu les autorisations nécessaires et pris mon bâton de pèlerin.» Une audace couronnée de succès. Quinze années après sa création, Phacobel est n°1 belge dans son secteur. « J’ai reçu plusieurs marques d’intérêt de groupes pharmaceutiques mais je ne suis pas intéressée, c’est un peu mon 3ème bébé. Je sais aussi, cependant, que si je ne me fais pas accompagner, l’entreprise ne pourra plus évoluer. Depuis cette année, j’ai donc accepté l’aide de consultants externes. Un apport qui nous permettra peut-être de concrétiser nos ambitions à l’exportation.» Preuve de cette appétence, Thouria Louhmadi planche sur la construction d’une extension de 7.000m² et le lancement de nouveaux produits. “La fille de l’Atlas” n’a pas fini de nous surprendre…
COUP DE GENIE
«C’est d’avoir pris le risque de quitter une situation professionnellement confortable pour me lancer en tant qu’indépendante. Une fois encore, j’ai écouté mon instinct. Je n’ai jamais regretté ce changement de statut. Bien évidemment, j’ai connu des moments difficiles car la vie de dirigeant d’entreprise n’est pas simple. On se sent seul, en particulier quand on est amené à prendre des décisions. Mais on s’en sort ! Pour être indépendant, il faut avoir la foi. J’ai ce côté “béguine” : je crois en moi et en l’entrepreneuriat (rires).»
COUP DE CŒUR
«Je voudrais le dédier à mon personnel qui me comble par son dévouement, sa loyauté et sa fidélité. Mes collaborateurs sont, parfois, sollicités par des grands groupes pharmaceutiques qui peuvent leur offrir bien plus d’avantages que moi. Ils sont pourtant nombreux à rester à mes côtés. Ils sont devenus une seconde famille. J’ai dans ce cadre une pensée particulière pour ma première déléguée commerciale, Pascale. Elle m’a donné le courage et l’envie d’aller plus loin.»
COUP DE GUEULE
«Voici quelques années, j’ai laissé s’échapper une molécule dotée d’un potentiel extraordinaire. Après en avoir fait la découverte, je suis entrée en contact avec une université africaine car cette institution me semblait la plus à même de faire avancer mes recherches. Trop occupée par la gestion de mon entreprise, je ne me suis pas pleinement investie dans ce projet. Un jour, les échanges par mail se sont interrompus. Sans nouvelles de leur part, j’ai pris un vol jusque-là… pour me rendre compte que la molécule avait été vendue à Pfizer et Unilever. A dater de ce moment, je me suis jurée de ne plus jamais manquer d’opportunisme en affaires.»
BIO EXPRESS
- Née un 25 mars à Marrakech (Maroc)
- 1979 : décroche son baccalauréat (option sciences expérimentales – mathématiques – physique) dans un lycée français de Casablanca.
- 1979 : s’envole pour la Belgique afin d’y poursuivre ses études
- 1985 : obtient une licence en sciences biologiques à l’Université de Liège
- 1985 : rejoint la branche pharma du groupe Janssen Pharmaceutica en tant que déléguée médicale et pharmaceutique
- 2000 : crée sa propre entreprise, Phacobel
- 2006 : quitte un bâtiment relais de la SPI et emménage dans le zoning de Tinlot
- 2010 : obtient l’autorisation de mise sur le marché européen d’un complément alimentaire à base de poudre de riz rouge.
- 2016 : lancement des travaux d’une extension de 7.000m²
- Mère de deux filles (Stéphanie et Aurélie) qui travaillent aujourd’hui à ses côtés
DU TAC AU TAC
- Quelle est votre plus grande qualité ?
La persévérance. - Votre plus gros défaut ?
Je suis un moteur diesel. J’ai un côté très dynamique mais lorsqu’il s’agit de prendre certaines décisions, je peux parfois attendre trop longtemps avant de me mettre en action. - Votre devise ?
Toujours avancer avec respect et dans la confiance. - Si c’était à refaire…
A quelques détails près, je referais les choses à l’identique. J’ai avancé à tâtons, en suivant mon intuition. Cette stratégie était la bonne pour emmener la société là où elle se trouve aujourd’hui. Je sais cependant qu’elle a atteint ses limites et que, si je veux passer à la vitesse supérieure, je vais devoir adopter une nouvelle politique.
PHACOBEL, C’EST :
- Une société spécialisée dans le développement, la production et la commercialisation de probiotiques. Elle est le leader du marché belge dans son secteur.
- Une gamme de 8 compléments alimentaires dédiés à la protection de la flore intestinale et vaginale, la préservation du cartilage, le confort des articulations, le renforcement du système immunitaire et l’amélioration du système cardio-vasculaire.
- 60.000 boites de comprimés vendues chaque mois en Belgique
- 48 collaborateurs
- 15 années d’existence
- 10.000.000 € de chiffre d’affaires (dont 5% à l’export)
Laboratoires Phacobel : Rue du Zoning n°5 à 4557 à Soheit – Tinlot – laboratoires@phacobel.be – www.phacobel.be