Les Restos du Cœur, cette idée géniale lancée par Coluche en 1985, sont plus que jamais actifs. En Belgique, c’est 3000 à 4000 colis par jour, 1.350.871 repas servis en 2021, 900.000 kg de marchandises traitées, 19 Restos du Coeur, 3 Restos du Coeur Mobiles, une quinzaine de véhicules réfrigérés, un hall de 1.500 m² à Fernelmont et surtout une équipe de 100 salariés et de plus de 500 bénévoles.
Les Restos du Cœur, c’est donc une grosse machine qui ne reçoit aucun subside structurel et qui fonctionne principalement grâce à la générosité du public, mais aussi – c’est moins connu – des entreprises. Des récoltes de produits alimentaires invendus sont par exemple organisées dans la grande distribution. Des entreprises effectuent aussi des dons directement dans les Restos du Cœur locaux. Quand il s’agit de grande quantité, la Fédération prend le relais.
« Nous venons de réaliser une première » souligne Patrick Dejace, Directeur de la Fédération. « Nous avons introduit un dossier auprès de la TVA pour que l’entreprise donatrice ait la garantie que les dons parviennent bien aux bénéficiaires. C’est une reconnaissance par la TVA initiée par le gouvernement fédéral il y a un ou deux ans. Nous sommes pionniers en matière d’aide alimentaire. »
Des besoins variés
Les Restos du Cœur sont preneurs de produits frais, comme des fruits et légumes, mais aussi de viande et de poisson. Les légumes en boite – pour nourrir les bénéficiaires toute l’année – et le café sont également recherchés. Mais l’aide des entreprises peut aussi se traduire par des dons en matière de produits d’hygiène (entretien, rasoirs, serviettes hygiéniques …).
« Nous avons de nombreux besoins » précise Guy Stukkens, Président du Resto du Cœur de Wavre « et nous vivons principalement grâce à une multitude de petits dons de particuliers. Une somme de 500 ou 1000 € ne représente pourtant pas grand-chose pour une entreprise, mais souligne son empreinte sociétale et citoyenne. Nous devons nous rapprocher du monde économique. »
La Fédération cherche également de véritables partenariats win-win, refusant d’être dans une posture d’aumône et soulignant que pour chaque euro versé (et déductible), 97,5 centimes reviennent aux bénéficiaires.
Si les Restos du Cœur fonctionnent bien, l’optimisme ne prévaut toutefois guère. « Les perspectives sont plutôt sombres en cette période de crise », regrette Jean-Gérard Closset, le Président de la Fédération. « Les revenus des bénéficiaires diminuent, les charges augmentent, la population vieillit avec notamment des problèmes de logement, etc… »
Une large palette d’activités
Le soutien à la Fédération est donc d’autant plus nécessaire que les activités se sont élargies.
« Au début de notre histoire » rappelle Patrick Dejace, « l’action était centrée sur l’alimentaire. D’autres piliers se sont imposés pour aider les gens à sortir de la précarité : le logement (directement à l’étage des Restos ou indirectement via des partenaires gestionnaires de logements sociaux), les soins de santé (médical, hygiène… ), l’éducation en général. Il convient d’agir sur les 4 piliers pour sortir du système de la pauvreté. »
Des travailleurs sociaux sont d’ailleurs présents dans chaque Resto. Le profil des bénéficiaires a évolué avec le temps et les récentes crises causent des dégâts, avec la crainte d’effets de retard. « Beaucoup de personnes ont du mal à franchir nos portes » constate Patrick Dejace. « Nous accueillons encore des SDF, mais aussi de plus en plus de nouveaux bénéficiaires tels que des travailleurs précaires, trop mal payés, des temps partiels, des pensionnés ou des familles monoparentales. Nous demandons une participation minimale aux bénéficiaires (50 centimes, 1 ou 2 euros selon la formule) afin que chacun conserve sa dignité. C’est aussi une manière de donner de la valeur à ce qu’ils reçoivent. »
A l’heure où la plupart des entreprises cherchent désespérément à recruter des travailleurs, les Restos du Cœur peuvent-ils servir de rampe de lancement ? « La plupart des bénéficiaires cumulent les problèmes : alimentaire, logement, intégration dans la société » constate Jean-Gérard Closset, Président de la Fédération. « Il faut les remettre sur une certaine voie pour les mettre en phase avec les attentes des entreprises : des personnes en bonne santé, capables de laisser leurs problèmes de côté, … Cela exige du temps et une évolution en profondeur. »
(photo Restos du coeur / Belga))