Avec qui et quand les cédants évoquent-ils la transmission en début de processus ?
La famille et l’externe sont les interlocuteurs privilégiés. La plupart s’adressent à un expert-comptable, réviseur, notaire. 5% en discutent avec des experts en transmission. Laurent Weerts, CEO de l’IEF, souligne que l’IEF est souvent approchée soit par des stakeholders qui s’inquiètent de ne pas voir clair dans le processus de la transmission ou par les parents qui ne savent pas comment s’y prendre. Les externes peuvent aider, en particulier aussi un conseiller de la famille, un entrepreneur qui a déjà transmis ses affaires à ses enfants. Bien entendu, le conjoint doit être consulté. Il ne faut pas directement et sans discussion préalable avec la famille « foncer » chez un fiscaliste/juriste… en tout début de processus. En résumé, il faut d’abord parler de la transmission avec son conjoint et puis un externe (un pair ou un consultant). Par après, aborder la question avec ses enfants.
Avec qui et quand les cédants évoquent-ils la transmission pendant le processus ?
Pendant le processus, la communication est plus importante avec le successeur quand il est identifié mais plus le temps passe, moins le conjoint est consulté. Laurent Weerts conseille de parler avec le successeur désigné. Si ce dernier agit comme souhaité, il n’y a aucun problème. Si par contre, il ne correspond pas aux attentes, la communication risque de devenir très difficile. La solution est alors le suivi par le Conseil d’Administration. Mais pour cela, il faut l’ouvrir à minimum un externe indépendant qui aura la lourde tâche d’enlever l’émotionnel des discussions et de jouer la courroie de transmission (communication) entre le cédant et le successeur.
En général, que ce soit avant, pendant ou après, la communication à propos de la transmission n’est pas suffisante. Le remède est de provoquer la discussion avec, par exemple, un outil fabuleux qui est la rédaction de la charte familiale dans laquelle parents et enfants sont réellement impliqués.
Quel est le canal de communication utilisé en entreprise pour parler de la transmission ?
Les cédants semblent « sur la réserve » avec les membres de leur entreprise mais ils communiquent quand même un peu. Par exemple, au sein de l’entreprise, seuls 19% des cédants ne communiquent rien quant à la désignation du successeur… Par contre, c’est intéressant de voir que 38% ne donnent pas d’explication sur la manière dont la transition du management va s’opérer, 45% ne communiquent pas du tout la date à laquelle ils quitteront l’entreprise et 62% ne communiquent pas d’informations concernant la transmission des parts.
Laurent Weerts propose de faire connaitre son choix aux membres de l’entreprise via l’organisation d’une réunion formelle et spécialement dédiée à ce sujet. Quant aux mystères à propos des parts, il est normal d’être discret sur le prix mais communiquer clairement aux membres de son entreprise que les actions ont été vendues ou données aux successeurs est recommandé. Qui a le pouvoir ? Si c’est une donation, le cédant garde-t-il l’usufruit? Une communication claire et précise enlèvera les incertitudes au niveau du personnel.
Laurent Weerts propose aussi de ne pas donner la date de son départ mais d’expliquer quelles seront les grandes étapes de la transmission et surtout, de maintenir un dialogue sur le sujet avec son personnel. A chaque grande étape, il faut mettre au courant son personnel et les principaux stakeholders. Tout est également fonction de l’âge du cédant et de son état de santé. Ne pas laisser place au fantasme et montrer que la transmission est prise en main. Communiquer par étapes. Au moment du règne conjoint, donner des informations claires à propos du successeur et de ses nouvelles attributions.
Quel est le canal de communication utilisé en famille pour parler de transmission ?
Plus de dialogues en famille qu’en interne mais dans plus de 20% des cas, aucune annonce particulière n’est faite. Cependant, trop peu de familles communiquent. Notons aussi que dans 59% des cas on communique à sa famille l’information quant à la personne qui reprendra l’entreprise de manière non formelle ou pas du tout… Il y a plus de communication informelle au sein de la famille qu’en entreprise. Il faut inverser cette tendance conseille Laurent Weerts, le cédant doit formaliser les choses au sein de sa famille pour que le sujet ne soit pas traité entre le fromage et le dessert. Les familles dans lesquelles cela se passe bien, la communication est formalisée. Il y a un temps pour les festivités et un temps pour les choses sérieuses. L’IEF préconise des réunions familiales « au vert ». On discute d’abord de choses sérieuses lors de réunions de travail et puis, on se détend (diner, activités,…).
Quels sont les aspects de la transmission évoqués par le cédant et le successeur ?
Dans 20% des cas, les cédants n’ont quasi pas de discussions approfondies avec leur successeur au sujet de leur transmission. 25% des cédants n’ont pas eu de discussion approfondie avec leur successeur concernant les modalités concrètes de transfert de la gestion de l’entreprise ! 24% concernant les modalités de transfert de la propriété.
Le remède selon Laurent Weerts est de bien définir ces points dès le début via la charte et un calendrier précis. Pas de place pour « on verra bien » mais clairement savoir si les parts seront achetées, données, la répartition,…. Pour le transfert de la gestion aussi, c’est important. Ne pas attendre mais anticiper. Le CA peut et doit aussi aider.
En début de processus, les compétences et la légitimité attendue du successeur sont évoquées mais les chiffres chutent quand on parle de la manière dont le cédant va le guider pour devenir le CEO, pour prendre sa place. Donc, le cédant n’est pas bavard par rapport à des actions qui le concerne (par opposition à des aspects qui concernent le successeur)… c’est pour cette raison qu’il faut se faire aider et surtout, anticiper les discussions et le déroulement des choses souligne Laurent Weerts.
Notons que la valorisation se fait aux différents stades de la transmission. La valorisation doit être traitée dès le début et ne pas attendre. Il faut savoir de quoi on parle et s’il y a des zones inconnues ou des points à éclaircir, il faut en faire la liste. Il est très important d’arrêter la méthode de valorisation dès le début du processus car bien entendu, la valeur va changer en fonction des résultats de l’entreprise et comme la transmission va prendre plusieurs années …
Quels sont les thèmes les plus faciles à aborder ?
- les raisons qui ont amené le cédant à sélectionner le successeur pour reprendre l’entreprise familiale
- la liste des compétences sur lesquelles le cédant attend que le successeur fasse le plus de progrès durant la phase de préparation
- la manière dont va se dérouler concrètement la phase de préparation
- le profil de compétences au début du processus et les (éventuellement grosses) lacunes que le successeur devra absolument avoir comblées au terme de celui-ci
- les objectifs que le successeur va devoir atteindre durant cette phase de préparation
Quels sont les thèmes les plus difficiles à aborder ?
- les possibilités de montage financier afin de détenir la majorité des parts de l’entreprise familiale
- la valorisation de l’entreprise
- la stratégie que le successeur compte mener une fois qu’il sera à la tête de l’entreprise familiale
- la date à partir de laquelle le successeur remplacera le cédant et deviendra officiellement le nouveau patron de l’entreprise familiale
Sur base de cette étude et de l’expertise de l’IEF, le guide des bonnes pratiques de la communication de la transmission a été mis au point : GUIDE IEF