Une équipe de l’ULiège découvre qu’un médicament régulièrement prescrit dans le cadre de maladies coronaires est aussi un antibiotique puissant, y compris contre des souches résistantes. Cette avancée majeure dans la lutte contre les infections par des bactéries résistantes aux antibiotiques, réalisée par une équipe de chercheurs et médecins de l’ULiège, du GIGA et du CHU de Liège est présentée dans la revue de référence en cardiologie JAMA Cardiology.
Le Professeur Patrizio Lancellotti, le Docteur Cécile Oury et leur équipe (Docteur Lucia Musumeci, Nicolas Jacques, GIGA-Sciences Cardiovasculaires, Service de Cardiologie, CHU de Liège) découvrent qu’un médicament contre la maladie coronaire, le syndrome coronaire et l’infarctus est aussi un antibiotique puissant. Cela représente une nouvelle avancée majeure dans la lutte contre les infections par les bactéries Gram-positives résistantes aux antibiotiques.
Les chercheurs démontrent que le médicament antiplaquettaire ticagrelor (commercialisé sous le nom de Brilique® en Belgique) possède une activité bactéricide contre les bactéries Gram-positives. De plus, ce médicament conserve une activité identique contre les souches résistantes aux antibiotiques. En effet, le ticagrelor tue les bactéries Staphyloccocus aureus et Staphylococcus epidermidis résistantes à la méthicilline et les Enteroccus faecalis résistantes à la vancomycine. Sa rapidité d’action est supérieure à celle des antibiotiques couramment utilisés en clinique et la fréquence d’apparition de résistance est extrêmement faible.
Cette découverte est de taille puisque le ticagrelor fait partie des médicaments les plus souvent administrés au monde pour la prévention des maladies cardiovasculaires, telles que l’infarctus du myocarde et les atteintes vasculaires cérébrales.
Les chercheurs apportent peut-être également une explication au constat que dans la grande étude clinique randomisée PLATO, les patients traités par ticagrelor présentaient une mortalité diminuée lorsque l’infection était la cause du décès et ce, en comparaison aux patients traités par un autre médicament antiplaquettaire, le clopidogrel.
Il faut savoir que les staphylocoques et les entérocoques résistants comptent parmi les pathogènes qui représentent l’une des plus grandes menaces pour la santé humaine au niveau mondial. Il est en effet de plus en plus difficile de les traiter en raison d’un manque d’efficacité des antibiotiques actuellement disponibles. Ces bactéries sont les premières responsables de l’infection des prothèses et des implants médicaux, de la septicémie et de l’endocardite. L’infection par les bactéries résistantes est associée à un très mauvais pronostic pour le patient vulnérable, ce qui résulte en une mortalité accrue, des séjours plus longs à l’hôpital et une augmentation des coûts de soins de santé.
L’équipe du Professeur Patrizio Lancellotti et du Dr Cécile Oury poursuit actuellement cette ligne de recherche importante à l’Université de Liège en collaboration avec le Professeur Bernard Pirotte et Éric Goffin (Centre Interdisciplinaire de Recherche sur le Médicament, CIRM) et le Professeur Bernard Joris (Centre d’Ingénierie des protéines, CIP). Leur objectif principal consiste à dévoiler de nouvelles stratégies thérapeutiques, basées sur le mode d’action du ticagrelor, dans la lutte contre les infections aux bactéries Gram-positives et l’antiobiorésistance.
© Kateryna_Kon