
L’UCM de la province de Liège a présenté ce mercredi son baromètre de la santé des PME liégeoises (< 50 travailleurs) sur base des comptes annuels 2023 (*) : il en ressort que l’écosystème est fragilisé, sous tension et en attente d’un soutien politique fort, comme l’analysent Valérie Saretto et Marc Vilet, respectivement secrétaire générale et vice-président d’UCM Liège.

Si Liège dispose d’un tissu d’entreprises dense (près de 100.000 entreprises) représentant 29 % des entreprises wallonnes et 7 % du total belge, il apparaît que sa croissance sur 10 ans atteint à peine 11 %, soit un niveau très inférieur à la Flandre (+ 27 %) et en-dessous de la Wallonie (+ 13 %).
Cette tendance est à mettre en rapport avec les créations d’entreprises, également à la peine malgré un chiffre de 8.031 unités, d’autant qu’elles concernent avant tout les professions libérales (en lien notamment avec l’obligation de prendre un numéro à la banque Carrefour) et le service aux entreprises. La majorité des entreprises en province de Liège sont unipersonnelles, ne comptant donc qu’un travailleur, le plus souvent un consultant. Par ailleurs, le top 3 du millier de faillites en 2023 – renouant avec le nombre d’avant moratoire décrété avec le Covid – est constitué par les secteurs de la construction, de l’horeca et du commerce de détail.

« Toutes ces données nous incitent à tirer la sonnette d’alarme » constate Marc Vilet. « Comment rendre l’environnement plus propice à la création et au développement des PME. Le contexte fiscal, énergétique et administratif est étouffant. L’état d’esprit doit encore évoluer mais il faut du temps. La région liégeoise a été pendant longtemps un bassin industriel avec de grandes entreprises dans lesquelles on travaillait de père en fils, parfois sur plusieurs générations. Cette situation n’est pas propice à l’esprit d’entreprendre. »
UCM attend donc des réformes autour de l’emploi, de la fiscalité et de l’indexation, sans compter le renforcement du soutien à l’entrepreneuriat.
Au niveau local, c’est plutôt la nécessité de faciliter l’accès aux terrains, de revoir les charges d’urbanisme et dans certains cas la fiscalité locale qui apparaît comme une priorité.
« Nos PME ne demandent pas des privilèges, mais un environnement dans lequel elles peuvent travailler, recruter, se transformer »
Top 3 des secteurs
Les services, la construction et l’industrie constituent le top 3 sectoriel en province de Liège, avec là aussi une croissance lente par rapport à la moyenne belge.
Si on prenait en compte les entreprises de plus de 50 personnes, la proportion du secteur industriel serait certainement un peu supérieure. Il est clair que quelques locomotives liégeoises (FN Herstal, John Cockerill, Safran Aero Booster,…) alimentent un beau réseau de sous-traitants. Notons aussi qu’une partie de l’activité émergente des sociétés des sciences de la vie se retrouve dans la catégorie des services.
Les chiffres révèlent une forte progression des professions libérales.
Au-delà de l’explication technique (cfr. inscription à la Banque Carrefour), l’UCM observe un autre phénomène. « La perception du statut d’indépendant a évolué dans la société. La jeune génération aspire à plus de souplesse dans son travail. D’autre part, les mesures prises pendant le covid comme le droit passerelle ont un peu gommé la part de risque liée à ce statut. »
Le baromètre révèle une autre donnée intéressante, et inquiétante, à travers une analyse de la résistance aux chocs (covid, indexation automatique des salaires, inondations, tram à Liège, pénurie de main-d’oeuvre…).
« Les PME sont résilientes mais il y a des limites, surtout après les épreuves traversées ces dernières années » relève Valérie Saretto. « En Belgique, une entreprise sur quatre saine jusqu’en 2020 se trouverait aujourd’hui incapable d’absorber un nouveau choc sans cash supplémentaire. Ce serait même une sur trois en Wallonie et en province de Liège. »
« Pas mal d’entreprises ont un genou par terre et on leur demande encore de faire des efforts supplémentaires, notamment pour assumer les transitions numériques et écologiques » ajoute Marc Vilet.
Un chiffre s’avère encore plus inquiétant : en Wallonie, 15 % des entreprises ne répondraient plus aux critères nécessaires pour obtenir un crédit bancaire.
Si un dynamisme est bien présent, il convient donc de redoubler de vigilance.
* baromètre réalisé en synergie avec les données nationales issues du rapport PME Graydon – UCM – Unizo et l’Atlas du Créateur. La période porte sur 2014-2023. Les chiffres ont été arrêtés le 12/11/24 sur base des comptes annuels 2023.